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Le cerveau - Les 5 ages du cerveau

Durant toute la vie, notre cerveau évolue. Au sommet de son activité autour de la vingtaine, il démontre une extraordinaire capacité d'adaptation, y compris à l'âge mûr, à condition de le stimuler.

Pour accéder directement à l'article qui vous intéresse, cliquez sur son titre ci-après :
             Au commencement, étaient 100 milliards de neurones
             «Le cerveau foetal anesthésié juste avant l'accouchement»
             Priorité aux connexions
             De 0 à 10 ans, le big-bang des synapses
             De 10 à 18 ans, l'influx nerveux passe au haut débit
             De 20 à 60 ans, le renouveau permanent
             Comment stimuler ses capacités
             «l'idéal, c'est la lecture, les sorties et le voyage»
             Après 60 ans, les deux hémisphères en alerte

 
Au commencement, étaient 100 milliards de neurones

Avant la naissance, une seule priorité : protéger le développement du cerveau «in utero» car, peu à peu, l'environnement prend le pas sur les facteurs génétiques. Un processus sensible, incompatible avec l'alcool et le stress.

Tout commence trois semaines après la conception, lorsque l'embryon s'organise en trois feuillets de cellules distincts dont l'un engendrera, entre autres, la première ébauche d'un tube nerveux. Ce tube primitif va se complexifier pour aboutir in fine à un formidable outil, un cerveau capable d'apprendre, de prendre des décisions, de réfléchir, de créer, d'aimer... Un processus si sophistiqué qu'il lui faudra pas moins de vingt années pour s'achever ! Grande découverte des neurosciences de cette décennie : le cerveau in utero n'est ni aveugle ni sourd au monde extérieur. Pierre Gressens, neuropédiatre et chercheur au laboratoire de pathologie neurologie antenatale de l'hôpital Robert-Debré, à Paris, résume :«Le cerveau foetal n'évolue pas en vase clos. Certes, un poids génétique dicte le calendrier des grandes étapes à suivre, mais le poids de l'environnement module ce programme établi dès la conception. Par environnement, il faut comprendre les autres organes du foetus et l'environnement maternel et extramaternel.»

Yehezkel Ben Ari, directeur de l'Institut de neurobiologie de la Méditerranée (Inmed) a consacré sa vie à étudier les cerveaux foetaux animaux. Il confirme : «Au cours du développement, l'environnement prend peu à peu le pas sur le programme génétique. La nature «sent» quelles modifications apporter en fonction des événements.»

Tout facteur extérieur venant au contact de l'embryon peut donc avoir des implications directes sur la croissance de son cerveau. Première précaution à suivre pour la future mère : prendre de l'acide folique (vitamine B 9) avant même la conception. «On sait aujourd'hui que le risque de développer deux malformations du tube neural, la myéloaraphie et le spina bifida, peut être diminué par la prise de 0,4 mg/jour d'acide folique, affirme Pierre Gressens. Mais encore faut-il le prendre durant la formation de ce tube, entre le 24e et le 26e jour de grossesse, à une période où la femme ne sait peut être pas encore qu'elle est enceinte. Toute femme devrait donc en prendre dès qu'elle envisage une grossesse.»

Survient ensuite, entre la 10e et la 20e semaine de gestation, la neurogenèse : des cellules souches situées dans le tube neural vont se multiplier et se différencier jusqu'à former un stock de 100 milliards de neurones. Vient le temps de la migration, entre la 12e et 24e semaine. Ces nouveaux neurones s'assemblent en six couches superposées, futur cortex cérébral, couche plissée qui recouvre les hémisphères de l'encéphale, siège de toutes les fonctions cérébrales évoluées. Chaque neurone est programmé pour s'installer à une place donnée et former des synapses (zones de connexions) avec les autres. Puis, un jour, c'est l'étincelle. Un influx électrique emprunte pour la première fois ces circuits. Et le cerveau devient fonctionnel.
Toutes ces étapes sont sensibles. «Il faut faire attention à ce qu'on absorbe, l'alcool étant la pire des substances, poursuit Pierre Gressens. Il altère toutes les étapes du développement cérébral et tous les types cellulaires. Cela provoque des symptômes chez l'enfant - troubles de la motricité fine, du comportement, baisse du QI - qui vont s'aggraver avec le temps.»

Selon le chercheur, il n'y aurait pas d'effet seuil. «Chaque femme ne métabolisant pas l'alcool de la même façon et le foetus ayant son propre métabolisme, on ne peut prédire quel sera le seuil de vulnérabilité d'un foetus.»

Autre danger : le stress. «Il fragilise le cerveau du foetus en faisant doubler les hormones du stress (dont le cortisol) dans le sang. Il augmente les risques d'accouchement prématuré.» Et une naissance prématurée n'est pas idéale pour le bon développement de l'encéphale. «Les prématurés en dessous de 28 semaines présentent de forts risques d'avoir des problèmes moteurs, cognitifs, de comportement. Sur une cohorte d'enfants nés à 24-25 semaines suivis jusqu'à 6 ans, la moitié a un handicap grave, un quart un handicap modéré, un quart s'en sort sans séquelle.»

Comment éviter ces drames ? «Nous testons une molécule bien connue, la mélatonine, qui induirait une réparation des lésions. Nous commençons un essai clinique sur des prématurés de 28 semaines qui recevront une semaine de mélatonine à la naissance.» Réponse dans un an.

Eléna Sender  -  février 2010

Le Cerveau de l'enfant, Hugo Lagercrantz, Odile Jacob (2008) : un voyage synthétique et pédagogique à travers le développement du cerveau.

«Le cerveau foetal anesthésié juste avant l'accouchement»

Que se passe-t-il dans le cerveau du foetus, juste avant la naissance ?
Des biologistes de notre unité ont récemment démontré que l'ocytocine, une hormone libérée par l'hypothalamus maternel, alerte le cerveau du foetus de l'imminence de l'accouchement. Il semble que les neurones foetaux soient ainsi anesthésiés pour affronter un éventuel manque d'oxygène.

Cette découverte remet-elle en cause certaines pratiques ?

Cela soulève des questions, notamment sur les médicaments donnés pour retarder les contractions en bloquant les récepteurs à ocytocine. Ne font-ils pas prendre des risques au cerveau du foetus en empêchant une neuroprotection naturelle ? De même, réaliser une césarienne sans contractions, sans ocytocine, est-ce sans risque ? Si c'est pour une question de confort, on peut hésiter. Il serait souhaitable de chercher de nouvelles molécules plus appropriées.

Pourquoi déconseillez-vous le café avant l'accouchement ?

En cas de privation d'oxygène, des récepteurs à adénosine, situés au bout des terminaisons nerveuses, sont bloqués pour protéger les neurones. La caféine se fixe sur ces récepteurs et empêche le blocage de se produire.

Priorité aux connexions

Au nombre de neurones dont nous disposons s'ajoute la qualité des réseaux que nous établissons. Retour sur les grands principes des mécanismes cérébraux.

LEXIQUE

1 - SUBSTANCE GRISE
Elle comprend les corps cellulaires des neurones et leurs dendrites ainsi que l'arborisation terminales des axones. C'est là que se trouvent les synapses.

SUBSTANCE BLANCHE
Elle correspond à la gaine de myéline qui recouvre les axones. Ces axones sont assemblés en faisceaux qui connectent différentes zones du cerveau entre elles.

2 - NEURONE
Unité fonctionnelle du système nerveux. Il est composé d'un corps cellulaire contenant le noyau et d'arborisations : un axone unique qui émet le signal électrique, des dendrites nombreuses qui le réceptionnent.

3 - MYELINE
Composée d'acides gras, elle forme des gaines autour de l'axone. Au lieu d'une conduction continue, l'influx électrique circule alors par «sauts» entre les gaines, accélérant sa vitesse de propagation. A l'adolescence, âge de tous les bouleversements, celle-ci passe de 0,5 mètre par seconde à 120m/s.

4 - SYNAPSE
C'est la zone de contact fonctionnelle qui s'établit entre deux neurones ou un neurone et une cellule (musculaire par exemple), et grâce à laquelle circule l'influx nerveux.

Le cerveau se spécialise

Une équipe du National Mental Health Institute, dirigée par Jay Giedd, a compilé en un film 3D des clichés d'IRM de sujets de 5 à 20 ans. Pour la première fois, il montre qu'à l'adolescence, le cerveau perd de la matière grise. Depuis 1991, tous les deux ans, des enfants ont passé une IRM. Conclusion : la matière grise atteint un pic entre 11 ans (filles) et 13 ans (garçons) puis diminue tandis que la matière blanche, elle, augmente. Signe que le cerveau se spécialise (élagage des connexions) et devient plus efficace (myélinisation des axones).


De 0 à 10 ans, le big bang des synapses

Les neurones acquis à la naissance cherchent à se connecter : le grand apprentissage commence. La meilleure stimulation ? La parole, les soins parentaux. Le piège : la télé ou les programmes à «fabriquer des génies».

Justine, deux ans et demi, connaît 200 mots, parle constamment, mitraillant ses parents de questions. Elle explore son univers, touche à tout, sans conscience du danger. La voilà qui grimpe sur une chaise pour attraper un gâteau dans le placard, n'y parvient pas, trépigne jusqu'à obtenir ce qu'elle veut... Sous son crâne, c'est une éruption volcanique ! «A son âge, des centaines de millions de nouvelles synapses sont produites chaque... seconde dans son cortex en construction, explique Jean-Pierre Bourgeois neurobiologiste, spécialiste mondial des synapses à l'Institut Pasteur. Son cerveau est en plein Big Bang synaptique
Imaginez un tissu en perpétuel remaniement : les 100 milliards de neurones donnés à la naissance ne se divisent plus mais pro- jettent leurs branches axonales (émettrices) comme autant de tentacules à la recherche de multiples contacts pour transmettre des signaux nerveux. Car ce qui fait la «qualité» d'un cerveau, c'est sa richesse en connexions. Peut-on les favoriser chez l'enfant ? Oui, répond la science, tout d'abord par les soins parentaux. «A la naissance, l'expression de certains gènes devient sensible aux variations du monde extérieur, poursuit Jean-Pierre Bourgeois. Les soins parentaux sont alors de toute première importance. Il a été montré, chez lerongeur, qu'une privation maternelle ou paternelle à la naissance modifiait la distribution topologique des synapses de certains neurones du cortex limbique (le cerveau des émotions). Et cette altération persiste chez l'adulte.» En outre, «la richesse des connexions de certains circuits synaptiques semble être proportionnelle à l'abondance de soins maternels prodigués aux nouveau-nés !»
Passée cette étape de prolifération, vient le temps de l'élagage des synapses. Le cerveau va subir des vagues successives de productions et d'éliminations des synapses. Chaque vague correspond aune période critique du développement, pendant laquelle divers types d'apprentissage sont facilités, comme la marche, le langage, la lecture, la dextérité, etc., et ce jusqu'à la fin de l'adolescence... Une fois une période critique close, il sera beaucoup moins aisé pour l'individu d'apprendre. «Il est primordial de stimuler l'enfant pendant ces périodes critiques, explique Hugo Lagercrantz, neuropédiatre à l'université de Stockholm, auteur du Cerveau de l'enfant (Odile Jacob). Les études menées dans les orphelinats ont montré que les individus qui n'ont bénéficié d'aucune stimulation ont un développement retardé qu'il est difficile de rattraper ensuite. Mais on peut s'interroger, à l'inverse, sur la possibilité d'accélérer le développement.» En 1997, une conférence, organisée sous l'impulsion de Hillary Clinton - alors que son mari était Président des Etats-Unis - et intitulée «L'apprentissage des bébés et le cerveau», a soulevé cette question du développement cognitif, devenu l'objet d'un débat passionné outre-Atlantique. La conclusion a été d'encourager les parents à entraîner leurs enfants, par des leçons de musique, des lectures à voix hautes, des échanges nombreux.
«L'objectif de ce colloque était surtout d'encourager la stimulation des enfants issus de milieux défavorisés», note Hugo Lagercrantz. Mais dans les faits, le marketing a pris le relais. «Des DVD de stimulation pour bébés ont fait leur apparition», ajoute le neuropédiatre. Et voici comment des programmes tels que Baby Einstein, Baby Brainy ou Baby Genius se vendent comme des petits pains aujourd'hui... Baby Enstein propose ainsi, dès 3 mois, un DVD pour «encourager l'utilisation des capacités motrices» ou pour «introduire les petits aux mots et aux signes de langage» dès 9 mois. Et les parents de laisser leur bambin devant ces programmes, pensant améliorer leurs aptitudes...
Erreur ! Andrew Meltzoff, codirecteur de l'Institut des sciences du cerveau et de l'apprentissage de l'université de Washington à Seattle, est un spécialiste mondial du développement du cerveau. Il a publié en 2007 une étude en forme de démenti dans Journal of' Pediatrics. Après avoir interrogé au téléphone 1000 parents à propos du temps que leurs enfants de moins de 2 ans passaient devant la télé et le nombre de mots qu'ils avaient acquis, le couperet est tombé : aucune corrélation n'a été trouvée entre la télévision et l'acquisition du langage. Pis : ceux qui regardent des baby- vidéos ont un développement du langage 17% plus lent que les autres. Pour être précis, l'acquisition du vocabulaire en est ralentie chez les bébés de 8 à 16 mois, et est sans effet négatif entre 17 et 24 mois. «Ne désespérez pas ! rassure cependant Andrew Meltzoff. Rien ne dit que la vidéo cause des dommages permanents. Mais rangez les DVD et ressortez les clés, pots ou casseroles avec lesquels les bébés adorent jouer.» «En ce qui concerne la télévision, elle peut entraîner des problèmes de concentration et de sommeil avant l'âge de 2 ans, confirme Hugo Lagercrantz. L'Académie de pédiatrie de Suède l'a d'ailleurs interdite. Après 5 ou 6 ans, en revanche, des programmes adaptés et intelligents peuvent être une stimulation.»
Alors, que faire pour stimuler le développement cérébral d'un enfant ? La réponse d'Andrew Meltzoff fuse : «Lui parler ! Même avant qu'il puisse parler lui-même, il cartographie le langage selon les sons qu'il entend. Les bébés sont comme des ordinateurs sans imprimante connectée. Ils ne peuvent produire ce qu'ils emmagasinent dans leur tête. De plus, la théorie et la recherche montrent que les conversations précoces avec les bébés sont une préparation pour leur future progression dans la lecture.» Andrew Meltzoff encourage les parents à ne pas trop réfléchir, finalement. «Ce que la science prescrit de faire, c'est précisément ce que nous faisons déjà quand nous sommes avec nos enfants - parler, jouer, faire des grimaces, s'intéresser à eux. Il faut juste trouver le temps nécessaire pour le faire.»

L'ENFANT

Son cerveau subit des vagues de productions et d'éliminations des synapses. Chaque vague correspond à une période critique du développement, pendant laquelle divers types d'apprentissage sont facilités, comme la marche, le langage, la lecture, etc.


De 10 à 18 ans, l'influx nerveux passe au haut débit

C'est l'âge où tout s'accélère : la personnalité se forge et le cerveau prend sa forme définitive en sélectionnant les neurones et les connexions utiles. Une phase qui correspond souvent à une grande vulnérabilité.

Les adolescents sont égocentriques, paresseux, irrationnels. C'est un «âge ingrat» où les jeunes ne pensent qu'aux jeux vidéo, à l'alcool ou à la drogue... Tels sont les poncifs les plus répandus à propos de cette période qui marque le passage entre l'enfance et l'âge adulte. La réalité est tout autre selon le sociologue Michel Fize, chercheur au CNRS. «L'immense majorité des jeunes (80%) se portent bien et sont satisfaits de grandir. Beaucoup s'en souviendront comme d'une période heureuse.» En fait, «la puberté est un atout. Cet âge est une période de créativité intense, de réflexion, d'intelligence, de génie même quand on voit comment les jeunes manient les nouvelles technologies».
Un âge où la personnalité se forge et où le cerveau prend petit à petit sa forme définitive. Grâce à deux phénomènes parallèles : l'élagage et la myélinisation. «Jusqu'au début de la puberté, la densité de synapses est maintenue à son niveau le plus élevé, explique Jean-Pierre Bourgeois, de l'Institut Pasteur. Jamais l'individu ne possédera autant de synapses. A partir de la puberté, commence le grand élagage que j'ai appelé la «cata synaptique pubertaire».» Chez le singe, la densité des synapses est ainsi diminuée de 40%.

Pourquoi une telle hécatombe ? Le cerveau se débarrasse des neurones et des connexions qui ne sont plus nécessaires au développement des circuits. «Durant cette phase très plastique, les meilleures choses à apporter à l'adolescent, ce sont des interactions riches avec un environnement sensoriel et socioculturel structuré et largement ouvert à l'altérité», poursuit Jean-Pierre Bourgeois. Parallèlement à cet élagage synaptique, la myélinisation, commencée durant l'enfance, se renforce et s'achève : les axones, fibres émettrices des neurones, vont s'entourer d'une gaine de myéline (riche en glycoprotéine). L'influx nerveux circulera non plus en continu le long de l'axone mais en sautant entre les gaines. Résultat : la vitesse de transmission de l'influx nerveux passe de 0,5 mètre par seconde à 120 m/s. La voiturette devient bolide ! En somme, le cerveau adolescent sélectionne les neurones et connexions les plus utiles tout en transformant ses câbles de transmission en fibres à haut débit : il se spécialise. Tous ces phénomènes, d'abord quantifiés chez le singe, ont été retrouvés chez l'humain. Une large étude d'imagerie cérébrale - publiée au printemps 2008 par le docteur Jay Giedd, chef du département d'imagerie cérébrale du service de pédopsychiatrie du National Institute of Mental Health (Etats-Unis) - a ainsi montré la maturation du cerveau de 5 ans à l'âge adulte. De là, les chercheurs ont fait l'hypothèse que l'immaturité du cortex préfrontal de l'adolescent pourrait expliquer les comportements impulsifs et les prises de risque si caractéristiques de cet âge. «C'est une sorte d'injustice d'attendre des adolescents d'avoir des dons d'organisation ou de prise de décisions d'un niveau adulte avant que leur cerveau ait fini de se construire», affirme Jay Giedd. Mais, en août dernier, une étude de l'université Emory (Atlanta, Etats-Unis) est venue jeter une pierre dans ce jardin. 91 jeunes âgés de 12 à 18 ans ont été suivis sur une période de trois ans, et leurs comportements à risque évalués par un questionnaire. Leur cerveau a été observé par une IRM dite par tenseur de diffusion (DTI), qui a l'avantage de visualiser les faisceaux des axones myélinisés, la structure fine de la matière blanche. Résultat, étonnant : «Nos observations suggèrent qu'au lieu d'avoir des cortex immatures, les adolescents qui s'engagent dans des activités dangereuses ont des fibres de matière blanche qui ressemblent davantage à celles des adultes qu'à celles de leurs pairs plus prudents», déclare Gregory Berns, coauteur de l'étude. «Cela ne remet pas en question notre étude mais y ajoute un nouveau degré de complexité, rétorque Jay Giedd. Peut-être que les étudiants les plus matures ont tendance à être les moins anxieux et sont plus à même de prendre des risques..

Michel Fize tranche : «Ces études sont engluées dans un présupposé : l'adolescent est définissable par la prise de risque. Ce qui est faux. Beaucoup d'adolescents ne prennent pas de risque. De même pour l'addiction. Trois quarts des adolescents ne boivent pas.» Pour le quart restant, cependant, il y a un grand danger pour le cerveau. «Il est particulièrement vulnérable, car il est en formation. Et plus on commence tôt plus c'est grave», rappelle le Dr Olivier Phan, psychiatre et responsable du centre Emergence Espace Tolbiac à Paris, un service spécialisé destiné aux patients souffrant de troubles liés aux drogues. Le Pr Susan Tapert, psychiatre de l'université de Californie à San Diego (Etats-Unis), a mené une étude, publiée en 2009, sur les conséquences cérébrales d'une consommation d'alcool en excès. Elle a examiné 36 jeunes de 16 à 19 ans dont la moitié avait expérimenté plusieurs épisodes de binge drinking (ivresse expresse). Tous ont subi une IRM DTI et des tests neurocognitifs. Résultats : il existe des altérations de la matière blanche et des tests cognitifs chez les adolescents consommateurs. Quant au cannabis, «un lien statistique a été montré entre sa consommation et le risque de schizophrénie chez des personnalités fragiles, énonce Olivier Phan. De la même façon, à long terme, il favorise la dépression.» Les ados ou les parents peuvent demander de l'aide auprès de consultations spécialisées. «Mais la première chose à dire aux parents c'est que, contrairement à ce qu'ils peuvent croire, ils comptent beaucoup pour leur adolescent. Le secret est d'adapter leur comportement à son âge. Tenir la main et accompagner mais sans diriger. Tout laisser-faire sera vécu comme un abandon.»

L'ADOLESCENT

«La puberté est un atout. C'est une période de créativité intense, de réflexion, d'intelligence, de génie même quand on voit comment les jeunes manient les nouvelles technologies.» Michel Fize, sociologue


De 20 à 60 ans, le renouveau permanent

Contrairement à une idée reçue, le cerveau continue de créer des synapses qui attestent de sa forte capacité d'adaptation. Mais pour que ces nouvelles connexions se fassent, il faut sans cesse les alimenter.

Passé 30-40 ans, installé dans la vie active, notre cerveau travaille sans arrêt du matin au soir, prend des informations, mémorise, analyse, décide... et assure aussi toutes les activités mentales comme le langage, la pensée ou la mémoire, ainsi que la régulation des fonctions vitales (battements cardiaques, respiration, transit intestinal... ) et des fonctions sensitives. Tout cela sans que l'on y prenne garde ! «C'est uniquement lorsque des anomalies surviennent - difficulté à trouver un mot, vertige, mal de tête... - que nous commençons à nous inquiéter de sa santé», assure Luc Bodin, médecin et auteur de Bien nourrir son cerveau. «Nous prenons alors conscience de ses besoins. Pourtant, c'est bien avant qu'il faut s'en préoccuper si nous voulons assurer son efficacité et empêcher sa détérioration
Le développement cérébral s'achève avant 25 ans. Les principaux circuits sont établis et stabilisés, et le lobe préfrontal, siège des activités cognitives supérieures, est arrivé à maturation. C'est à cet âge que le cerveau atteint son pic de puissance. Ensuite, s'il commence son tranquille déclin, ce sont surtout les capacités d'apprentissage fin (un instrument de musique, une langue étrangère, etc.) qui sont affectées. Car contrairement à ce que l'on a longtemps pensé, la perte neuronale est faible pendant la vie adulte. «Statistiquement, selon les travaux réalisés sur des personnes décédées par Geneviève Leuba, neurobiologiste de la faculté de Lausanne, on peut dire que l'on conserve pratiquement tous ses neurones pendant cette période, explique Jean- Pierre Bourgeois, de l'Institut Pasteur. La perte n'est significative que lors de maladies neurodégénératives
Deuxième bonne nouvelle : le cerveau a de la ressource. Deux zones - au moins - continuent à produire de nouveaux neurones, au niveau de l'hippocampe et du bulbe olfactif (lire Sciences et Avenir n° 727, septembre 2007), ce qui confère à ces zones du cerveau adulte une relative plasticité neuronale et une certaine capacité de récupération. Mais surtout le cerveau n'a pas perdu son extraordinaire faculté à modifier et créer de nouvelles synapses. La plasticité synaptique, si présente à l'enfance (lire pp. 50-51), ne nous a pas totalement abandonnés. «Il existe une synaptogenèse adulte, et ce jusqu'à la mort», assure Jean-Pierre Bourgeois. Elle nous permet de toujours progresser et de nous adapter au plus près aux changements de la vie. «Ce sont ces connexions qui déterminent le fonctionnement mental, rappelle Alain Lieury, psychologue à l'université de Rennes. Lors d'un apprentissage, les stimulations répétées (faire un geste, dire un mot...) vont aboutir à des échanges d'ions entre neurones voisins et à la construction de nouvelles synapses.» Imaginons qu'un comptable se reconvertisse en ébéniste : les synapses des zones de son cortex moteur correspondantes à l'agilité manuelle vont se renforcer, alors que celles mobilisées pour le calcul vont s'affaiblir. Tout type de stimulation est à même de déclencher ainsi la modification des réseaux de connexions. Une étude publiée dans Nature Neuroscience en septembre 2006 montre ainsi que le singe mâle fabrique de nouvelles synapses lorsqu'il devient... papa.
Pour que ces nouvelles connexions se fassent, le cerveau doit être entretenu, nourri, entraîné voire stimulé. Comment ? Chaque chercheur à son idée : «L'établissement de nouvelles connexions nécessite de l'énergie, de l'oxygène et des éléments nutritifs essentiels fournis par l'alimentation», assure Jean-Marie Bourre, de l'Académie des sciences. «Mieux vaut vivre dans un milieu intellectuellement niche, estime pour sa part Jean-Pierre Bourgeois. On a ainsi montré, chez l'animal, que des adultes placés dans de grandes cages enrichies en stimuli sensoriels moteurs et cognitifs voyaient leurs gènes de plasticité réactivés et la naissance de nouvelles synapses.» «La vie professionnelle, si elle est suffisamment stimulante, apporte tous les ingrédients nécessaires pour maintenir un cerveau à son niveau de fonctionnement optimal», rappelle Alain Lieury. Pour Dominique Müller, chercheur en neuroscience et pharmacologue de l'université de Genève, la clé serait la pratique d'activités variées et multiples : «Plus on explore de multiples aspects du cerveau, mieux c'est

Certaines personnes, a la recherche d une meilleure performance, n'hésitent pas aussi à faire appel à la pharmacologie. «Les stimulants psychomoteurs connus sont la caféine, les amphétamines, la cocaïne, ainsi que des molécules nouvelles, comme le modafinil, les ampakines ou les molécules histaminergiques », énumère Dominique Müller. Stimulent-ils vraiment les synapses ? «Il y a un certain degré de scepticisme chez les chercheurs, répond le spécialiste. Car on ne peut pas augmenter artificiellement le nombre de neurones ni celui des connexions. Il existe, en effet, des mécanismes de régulation qui maintiennent un niveau d'activité donné. On peut donc obtenir une petite amélioration, mais il serait exagéré dépenser que ce sont des «boosters»
Se pose surtout la question de l'éventuelle dépendance à ces molécules, ainsi que les répercussions sur le reste du système nerveux qui peuvent en découler. Que penser ainsi du modafinil, molécule développée à l'origine pour traiter les hypersomniaques mais largement détournée par des personnes en bonne santé qui souhaitent réduire leur temps de sommeil ? «Qui connaît son influence sur la personnalité, la manière de voir les autres et le monde ?» questionne Dominique Müller. Car ces molécules agissent sur les systèmes de la récompense qui influent eux- mêmes sur les systèmes de décision. Un jeu de dominos problématique.

ADULTE

«On conserve pratiquement tous ses neurones pendant la vie adulte. La perte n'est significative que lors de maladies neurodégénératives.»Jean-Pierre Bourgeois, de l'Institut Pasteur

Comment stimuler ses capacités

Bien dormir pour rester en éveil

Condition «sine qua non»
du bon fonctionnement du cerveau : dormir. «Car pour améliorer ses capacités cognitives il faut être... bien réveillé. On ne connaît pas d'autre fonction au sommeil sinon celle de nous permettre de rester éveillés !» rappelle Medhi Tafti, spécialiste du sommeil à l'université de Lausanne. «Cela permet de ramener les synapses à un état de repos.» Combien de temps faut-il donc nous reposer ? «Il y a des petits et des gros dormeurs, c'est génétique. Mais disons qu'en deçà de sept heures, vous risquez d'être moins efficace.» La courbe de performance du cerveau comprend deux pics : deux heures après l'éveil et entre 14 et 18 heures, au moment où le corps atteint le maximum de sa température centrale. Entre-temps, chacun peut être victime de chutes de vigilance, voire de somnolences, notamment en milieu de journée.«Pour les contrer, on peut prendre un ou deux cafés : en fonction du poids et de la vitesse d'ingestion, le taux plasmatique monte rapidement et est en général à son maximum au bout de 30-45 minutes, mais l'effet éveillant est ressenti au bout de 10 à 15 minutes. Il faut y ajouter si possible une sieste d'un quart d'heure. Vous serez ainsi d'attaque pour quatre-cinq heures de vigilance optimale.»

Fuir le stress pour éviter l'atrophie

«Le stress produit une libération de cortisol, rappelle André Delacourte, directeur de recherche à l'Inserm. Or il a été montré que dans un bain de corticoïdes, le neurone s'affaiblit, voire dégénère.» Voilà pourquoi, sous l'effet d'un stress répété, certaines zones du cerveau s'altèrent. Conséquence majeure : la dépression.
L'hippocampe lié à la mémorisation s'atrophie et l'amygdale, impliquée dans les réactions de peur, devient hyperactive. Les relations entre le cortex orbitofrontal (circuit de la récompense) et les régions limbiques (circuit des émotions) dysfonctionnent, le cortex préfrontal (réflexion, organisation) ralentit son activité. D'où un manque d'envie, une indécision, une hyperémotivité... «Mieux vaut traiter la dépression précocement pour éviter une rechute, explique Cédric Lemogne, du service de psychiatrie de liaison de l'hôpital européen Georges-Pompidou, à Paris. D'autant que plus un individu fait d'épisodes dépressifs, moins le stress déclenchant un nouvel épisode devra être important.» Dans le cerveau âgé, deux régions cérébrales perdent naturellement des neurones : l'hippocampe et la substance noire (contrôle des mouvements). «Ce phénomène dégénératif est présent chez tout le monde, souligne André Delacourte. Pour la plupart des gens, il y a une compensation, grâce à une probable réserve cognitive (des neurones de secours).» Mais chez certains, la neurodégénérescence va s'emballer provoquant une maladie de Parkinson, une démence à corps de Lewy ou un Alzheimer. «Le stress accélère cet emballement de deux à trois ans...»

Psychostimulants, ne pas céder à la tentation

Détourner l'usage de certains médicaments pour augmenter le niveau de performance ? Le risque est grand, à commencer par le méthylphénidate chlorhydrate (Ritaline) - prescrit pour traiter le déficit d'attention avec hyperactivité chez l'enfant de plus de 6 ans - utilisé pour augmenter le niveau de concentration. L'action de type amphétaminique libère dans le cerveau de la dopamine, un neurotransmetteur qui joue un rôle clé dans le «système de récompense», mais les effets secondaires sont insomnies, troubles de l'humeur, anxiété... et un risque majeur de pharmaco-dépendance. Autre star des «smart drugs» (psychostimulants), le modafinil. Administré aux hypersomniaques, il est détourné pour pallier le manque de sommeil avec, à la clé, des céphalées, insomnies, vertiges, anorexie... Nouvelles substances : les ampakines. Cette famille, encore au stade d'essai clinique, favoriserait une meilleure conduction de l'influx nerveux par l'activation des récepteurs AMPA présents sur les neurones. Le «CX717» de la société Cortex est ainsi développé pour maintenir les performances et l'éveil chez les soldats privés de sommeil. Les effets secondaires n'ont pas encore été publiés. Parmi les stupéfiants, la cocaïne (3,9% des Français de 26-44 ans (1)) et les amphétamines (1,4% des personnes de 15 à 75 ans (1)) augmentent le niveau d'éveil en accroissant la libération de dopamine dans le cerveau. Mais elles entraînent une très forte accoutumance ou dépendance et de graves effets néfastes à long terme.

(1) Observatoire français des drogues et des toxicomanies, www.ofdt.fr

Eléna Sender

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Riche en acides gras«Le cerveau consomme à lui seul20% de l'énergie de l'organisme, affirme Jean-Marie Bourre, auteur de «la Nouvelle Diététique du cerveau» (Odile Jacob Poche) et membre de l'Académie de médecine. Le neurone demande un apport constant d'oxygène (comburant), de glucose (carburant) et de divers nutriments. Par ailleurs, la conduction de l'influx nerveux est véhiculée par la membrane biologique du neurone qui entoure le corps cellulaire et ses prolongements, constituée en grande partie d'acides gras.» En conséquence, un régime riche en acides gras entretient la structure des membranes et la conduction de l'influx nerveux. Mais pas n'importe lesquels ! Seuls les acides gras essentiels, alpha-linolénique et linoléique de la famille des oméga-3 et oméga-6 (huile de poisson, colza, noix. ..)sont efficaces.Riche en glucides complexes. Contrairement aux sucres «rapides» (sucreries), les glucides complexes contenus dans les féculents, d'abord le pain et les pâtes, mais aussi haricots blancs, petits pois... se dégradent lentement et maintiennent de ce fait un bon niveau de glucose sanguin pendant plusieurs heures. Ils doivent donc faire partie des trois repas de la journée.Pas trop sucre. Selon une idée reçue - surtout chez les étudiants - boire une boisson énergisante sucrée stimulerait les fonctions cérébrales. Or«ingérer une boisson sucrée une heure avant un examen est une bêtise car le sucre étant absorbé très vite, le cerveau se retrouve en hypoglycémie réactionnelle au moment où il a besoin de toutes ses capacités. Mieux vaut privilégier les glucides complexes (ceux du pain) pour que le glucose sanguin soit à l'optimum», explique Jean-Marie Bourre.Avec une pointe de vitamine C présente au niveau des terminaisons nerveuses, la vitamine C dynamise la communication entre neurones. La dose recommandée quotidiennement se trouve dans environ 100 g de brocolis crus (mais la cuisson en détruit la moitié) ou 160 g d'orange. Arrosé de beaucoup d'eau. L'eau améliore l'irrigation du cerveau. «Pour éviter la fatigue cérébrale, il faut en boire 1,5 litre par jour, explique Luc Bodin, à adapter à la chaleur et à l'exercice physique. Plutôt que du café, buvez un ou deux grands verres d'eau et vous verrez une amélioration dans les dix minutes qui suivent.»Pas trop «light»Le dîner doit aussi comporter des glucides complexes pour éviter une hypoglycémie nocturne, sans quoi la mémorisation risque d'être mauvaise.

«l'idéal, c'est la lecture, les sorties et le voyage»

La mémoire est divisée en modules. Après 50-55 ans les mémoires sémantique (bagage culturel), implicite (mémoire non verbale) et procédurale (gestes) se maintiennent assez bien. En revanche, la mémoire épisodique (souvenirs personnels) décline. Il a été montré que chez les personnes ayant une vie professionnelle stimulante intellectuellement, l'effet est retardé.

Quelle est la différence entre vieillissement normal et maladie d'Alzheimer ?
Dans la maladie d'Alzheimer, la mémoire épisodique est irrémédiablement détruite, car les neurones de l'hippocampe dégénèrent. Dans le vieillissement normal, ce seraient les stratégies de rappel des souvenirs qui fonctionneraient moins bien. Le souvenir, lui, est toujours présent.

Comment aider le cerveau à compenser ce déclin normal ?
De lui-même le cerveau compense. Des travaux récents montrent une utilisation des deux hémisphères chez la personne âgée, alors qu'une personne plus jeune n'en utilisera qu'un seul pour la même tâche. Quelques travaux récents ont montré que cette utilisation plus importante des deux hémisphères est plus particulièrement marquée chez les personnes qui ont une meilleure mémoire, ce qui laisse penser qu'il s'agit d'un phénomène compensatoire. Pour entretenir cette compensation, il faut maintenir un bon niveau cognitif. Lire, sortir, discuter. L'idéal c'est le voyage. Le fait de planifier, organiser, décider, se confronter à des situations nouvelles, vaut toutes les stimulations.

Après 60 ans, les deux hémisphères en alerte

Certes, passé un certain âge, le cerveau devient moins réactif. Mais les chercheurs ont découvert qu'il dispose d'une «réserve cognitive». Celle-ci doit être stimulée par des activités intellectuelles.

C'est l'heure de la retraite pour madame T. Elle fourmille de projets de voyages, d'activités intellectuelles, ne sèche aucun cours de gymnastique aquatique et peut compter sur ses amis pour organiser d'interminables soirées de Trivial Pursuit. D'après une étude de l'Inserm, publié en septembre dans la revue Neurology, madame T. a le profil idéal pour échapper aux maladies neurodégénératives. «Nous avons analysé les données de 6000 personnes âgées de 65 ans et plus à Bordeaux, Montpellier et Dijon, expose Tasmine Akbaraly, coauteure de l'étude. Après avoir recueilli de multiples informations sur le mode de vie, la prise de médicaments, le bilan neuropsychologique, etc., nous avons regardé l'évolution sur quatre ans. Résultat, 161 cas de démence ont été répertoriés. Nous avons statistiquement montré que les participants pratiquant plus de deux fois par semaine une activité intellectuellement stimulante étaient deux fois moins susceptibles de développer cette maladie que les autres

Comment l'activité intellectuelle protège-t- elle le cerveau ? On ne le sait pas encore exactement, mais une hypothèse paraît de plus en plus étayée. «Le cerveau aurait une «réserve» cognitive, capable de compenser jusqu'à un certain point les lésions dues à la maladie. Ces activités de toutes sortes contribueraient à augmenter cette réserve», affirme Tasmine Akbaraly. Cette réserve serait constituée de circuits de neurones redondants, sollicités en cas de défaillance des circuits, comme une sorte de système de secours.
Qu'est ce que le vieillissement cérébral ? Un processus progressif de perte de plasticité. «Toutes les membranes des neurones, chargées de lipoprotéines, vont s'oxyder petit à petit, explique André Delacourte, directeur de recherche du groupe Maladies neurodégénératives etmortneuronale, unité Inserm 837. Les cellules nerveuses - surtout l'axone - vont se rigidifier, entraînant un ralentissement progressif du transport de l'influx nerveux dans les circuits. Le cerveau devient moins souple, moins réactif. Il traite moins bien l'information et s'adapte mal aux changements.» Il faut donc tout faire pour éviter ce stress oxydatif des membranes. Un combat difficile, mais possible, notamment par l'alimentation et l'activité intellectuelle. Pas question donc de laisser ses neurones en jachère une fois la retraite venue ! De là à s'acheter tous les ouvrages et jeux censés stimuler le cerveau... «Ce n'est pas la pratique d'exercices de «gym cérébrale» dix minutes par jour qui va changer les choses ! Nous avons mené une expérience avec un jeu très répandu, celui du «Dr Kawashima», et avons montré que ces programmes n'ont aucun intérêt», affirme Alain Lieury, neuropsychologue de l'université de Rennes. Inutile par exemple d'espérer mieux se souvenir de l'endroit où l'on a rangé ses clés en remplissant quotidiennement une grille de sudoku... Car notre mémoire fonctionne comme un ensemble de modules distincts. «Lorsqu'on pratique un exercice visio-spatial, par exemple, on sollicite un module, les autres n'entrant pas en ligne de compte.» André Delacourte ajoute une autre réserve : «Ces jeux peuvent provoquer un stress de mise en situation d'échec chez leurs participants, ce qu'il faut à tout prix éviter !» Car tous les stress sont délétères pour les cellules nerveuses, déjà fragilisées par le stress oxydatif.

Autre priorité : entretenir ses sens. «Le vieillissement des sens ne facilite pas les choses, résume le chercheur lillois. Quand on voit moins bien, on entend moins bien, on s'isole et on s'affaiblit. En corrigeant l'entrée sensorielle des informations, en appareillant une ouïe faible par exemple, on retarde cet effet.» «Toutes ces études montrent une chose, conclut Tasmine Akbaraly. Il faut promouvoir les activités de toutes sortes dans la population âgée qui va grandissante dans nos sociétés. C'est un vrai choix de santé publique, sans effet secondaire.»

Pour en savoir plus
Bien nourrir son cerveau, Luc Bodin, Dauphin.
La Diététique du cerveau, Jean-Marie Bourre, Odile Jacob.
Stimuler ses neurones, oui mais comment ?, Alain Lieury, Dunod.



Date de création : 24/10/2010 @ 14:54
Dernière modification : 24/10/2010 @ 14:55
Catégorie : Le cerveau

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